L’objectif de cet article est de présenter le risque d’Introduction de Produits Contrefaits ou Frauduleux (CFS) en milieu nucléaire ainsi que les exigences de l’ISO 19443 en termes de prévention de la contrefaçon et de la fraude.

Introduction

Dans l’industrie nucléaire, la sûreté est une priorité absolue. Chaque composant, matériel, et système doit répondre aux normes de qualité les plus élevées, car toute défaillance peut avoir des conséquences catastrophiques. Cependant, l’une des menaces les plus insidieuses pour la sécurité des centrales nucléaires est l’introduction de produits contrefaits ou frauduleux. Ces produits, souvent difficiles à détecter, peuvent compromettre la sécurité et la performance des installations nucléaires. Dans cet article, nous explorerons les risques associés à l’introduction de produits contrefaits dans une centrale nucléaire, en nous basant sur des cas concrets. Nous verrons également comment la norme ISO 19443 peut aider à minimiser ces risques.

Qu’est-ce qu’un produit contrefait ou frauduleux ?

Les produits contrefaits et frauduleux sont des articles qui ne répondent pas aux spécifications requises et qui sont intentionnellement mal étiquetés, fabriqués ou réparés pour tromper l’utilisateur final. Ils peuvent inclure des pièces détachées, des matériaux ou même des systèmes entiers qui ne respectent pas les normes de qualité et de sécurité.

Exemples de produits contrefaits dans l’industrie nucléaire

  • Plusieurs incidents dans le passé ont illustré le danger des produits contrefaits dans le secteur nucléaire. L’un des cas les plus notables est survenu en 2012, lorsqu’un fournisseur sud-coréen a été découvert pour avoir fourni des composants de sécurité contrefaits à plusieurs centrales nucléaires. Ces composants, qui incluaient des fusibles, des commutateurs et des relais, étaient destinés à des systèmes de sécurité critiques. Heureusement, les pièces défectueuses ont été découvertes avant qu’un accident ne se produise. Toutefois cet incident a souligné la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement dans le secteur nucléaire.
  • En 2016, une autre affaire a révélé que la société française Areva avait fourni à EDF des pièces fabriquées avec des certificats de conformité falsifiés. Ces pièces étaient destinées à plusieurs centrales nucléaires en France et ailleurs en Europe. Bien que les autorités aient rapidement réagi pour contrôler la situation, cet incident a montré que même les plus grands acteurs du secteur peuvent être victimes de fraudes

Les conséquences potentielles des produits contrefaits

L’introduction de produits contrefaits dans une centrale nucléaire peut avoir des conséquences graves, notamment :

  • Risque accru d’accident : Les produits contrefaits peuvent ne pas fonctionner comme prévu en cas d’urgence, compromettant ainsi la sécurité des installations. Par exemple, un composant critique pourrait échouer au moment où il est le plus nécessaire, entraînant des dysfonctionnements majeurs.
  • Coûts financiers : La détection, la suppression et le remplacement de produits contrefaits peuvent engendrer des coûts énormes. De plus, les interruptions de production pour cause de réparation ou de remplacement peuvent entraîner des pertes financières considérables.
  • Perte de confiance : La découverte de produits contrefaits peut nuire à la réputation d’une entreprise et éroder la confiance du public et des régulateurs dans l’industrie nucléaire.

La norme ISO 19443 : une réponse au risque

Face à ces risques, la norme ISO 19443 offre un cadre précieux pour améliorer la gestion de la qualité et la sécurité dans les chaînes d’approvisionnement nucléaires. Cette norme, publiée en 2018, est spécifiquement conçue pour les organisations qui fournissent des produits et services à l’industrie nucléaire. Elle est basée sur les principes de l’ISO 9001, mais avec des exigences supplémentaires liées à la sûreté nucléaire.

Les principales exigences relatives à la prévention du risque de contrefaçon ou de fraude sont reprises dans le §8.1.1. En voici la synthèse :

  • Introduire l’évaluation de ce risque dans le processus de sélection des fournisseurs et sous-traitants.
  • Décliner aux fournisseurs et sous-traitants des exigences de prévention de la contrefaçon et de la fraude,
  • Maîtriser les activités externalisées,
  • Mettre en place des activités de surveillance.

De façon plus explicite, quelques exemples d’outils permettant de répondre aux attentes :

  • Une analyse de risques fournisseurs,
  • Décrire les exigences qualité aux fournisseurs,
  • Contrats,
  • Audits des fournisseurs critiques,
  • Inspection documentaire et qualitative des articles IPSN,
  • Mise en place de contre-expertises (essais matières, …),
  • Sensibilisation du personnel en lien avec les activités d’achats et de réception aux risques CFS

Conclusions

L’introduction de produits contrefaits ou frauduleux dans une centrale nucléaire représente un risque majeur pour la sûreté, la réputation et la viabilité financière des entreprises du secteur. Les incidents passés montrent que tous les acteurs de l’industrie peuvent être touchés par ce phénomène. Cependant, grâce à des normes comme l’ISO 19443, les entreprises peuvent renforcer leurs processus de gestion de la qualité et réduire significativement ce risque.